Un été sur le continent africain : changements politiques, sécuritaires et diplomatiques (1/2)
Pendant l’été, plusieurs processus démocratiques se sont tenus en Afrique. Ces évènements ont été accompagnés de profondes mutations sécuritaires et diplomatiques. Sur le plan politique, les Tunisiens ont été appelés à voter lors d’un référendum pour une nouvelle constitution. Le Kenya et l’Angola ont tenu des élections présidentielles. Le Japon a de son côté tenté de renforcer sa position stratégique sur le continent lors du sommet TICAD.
Référendum controversé en Tunisie
Le 25 juillet, un peu plus de neuf millions d’électeurs ont été appelés aux urnes. Au final, un peu moins de 28% ont pris part au référendum sur la nouvelle Constitution. Ce, tout juste un an après la suspension du Parlement et quatre mois après sa dissolution par l’actuel président. Malgré une faible participation le « oui » a prévalu.
C’est le président Kaïs Saïed, élu au suffrage universel en 2019, qui porte ce projet controversé. Malgré un coup de force parlementaire il y a un an, ce dernier bénéficie d’un important soutien populaire. Cette nouvelle Constitution instaure un régime ultra-présidentiel, en rupture avec le système parlementaire en place depuis 2014. Ses opposants, qui peuvent encore s’exprimer de façon relativement libre, l’accusent de consacrer un régime autoritaire. Cependant, un raidissement policier et sécuritaire est déjà perceptible.
Le régime de Saïed est incontestablement autocratique. Les Européens, quant à eux, vont suivre de près l’évolution de la politique du président. Reste à voir si les préoccupations vis-à-vis d’une possible dérive dictatoriale seront fondées ou non. Outre la question politique, l’Europe s’intéresse aussi à la stabilité de la région qui impacte sur les flux migratoires et le risque terroriste.
Élections au Kenya
Des millions d’électeurs kényans étaient appelés aux urnes le 9 août 2022 pour élire le successeur du président sortant, Uhuru Kenyatta. Cette élection a vu s’affronter Raila Odinga, soutenu par le parti présidentiel, et le vice-président William Ruto. Le processus électoral s’est déroulé dans un climat apaisé, bien loin des tensions de 2017. Dans un contexte d’inflation galopante et d’un fort taux de chômage des jeunes, la réponse politique se devait d’être à la hauteur, au sein d’une des premières économies du continent.
La commission électorale a tout d’abord donné la victoire à William Ruto. Cependant, quatre des sept membres de cette commission se sont ensuite désolidarisés des résultats. Ils relevaient une gestion opaque et un écart extrêmement faible entre les deux candidats (50,49% contre 48,85%). Le 22 août, Odinga a quant à lui déposé un recours devant la Cour suprême contestant les résultats. Le candidat, battu lors des quatre précédentes élections présidentielles, avait déjà saisi la Cour suprême en 2017. La présidentielle avait alors été invalidée pour « irrégularités ».
Le 5 septembre, la Cour suprême, a confirmé William Ruto comme étant le nouveau président du Kenya, le cinquième depuis l’indépendance du pays en 1963.
Élections en Angola
Les élections législatives du 24 août 2022 ont opposé le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA) de João Lourenço, le parti au pouvoir, et l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (UNITA) d’Adalberto Costa Júnior, le principal parti politique d’opposition.
La Commission nationale électorale a proclamé la courte réélection du MPLA sur l’UNITA, avec 51,17 % des voix contre 43,95%. Le MPLA, parti au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1975, n’a toutefois pas obtenu la majorité des deux tiers. Celle-ci est nécessaire pour voter des lois sans avoir à former de coalition. Ces résultats interviennent dans un contexte de grandes difficultés économiques en Angola, malgré les richesses en ressources naturelles. L’opposition y est plus forte que jamais, portée par une jeunesse née après la guerre civile (1975-2002) en quête de changement.
De plus, le décès de l’ancien président José Eduardo dos Santos a été l’occasion pour le MPLA de lancer de grands procès anti-corruption contre la famille du défunt. L’UNITA a décidé de saisir la Cour constitutionnelle afin de vérifier l’exactitude des résultats. Dans une décision rendue le 8 septembre, la Cour a validé l’élection du président sortant.
Sommet Afrique-Japon – TICAD
Tunis a accueilli, les 27 et 28 août 2022, la 8ème édition du sommet Afrique-Japon (Conférence internationale de Tokyo pour le développement de l’Afrique – TICAD). Ce sommet réunissait une trentaine de chefs d’État et de gouvernement d’Afrique, le premier ministre japonais Fumio Kishida, l’Union africaine, les Nations unies et la Banque mondiale.
Le TICAD a permis au Japon de réaffirmer sa volonté de jouer un rôle de partenaire économique prépondérant sur le continent. En effet, Tokyo souhaite proposer à l’Afrique, un modèle de développement alternatif. Surtout, différent de celui de la Chine, avec son projet de « nouvelles routes de la soie » (ou Belt and Road Initiative). Les discussions ont porté sur l’économie, l’établissement d’un environnement « résilient et durable » et sur la consolidation de la démocratie. Le Japon a fait part de son vœu d’aider l’Afrique à obtenir un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Il s’agit d’une revendication ancienne et maintes fois réitérée par les diplomaties africaines.
Le sommet se tenait en Tunisie, où un coup de force constitutionnel résultant en une concentration des pouvoirs dans les mains du président Kaïs Saïed, a eu lieu récemment.
par Cédric